Keljob – Cadremploi : précisions et hypothèses

On a maintenant quelques précisions sur le « rapprochement stratégique » entre Keljob et Cadremploi évoqué dans le précédent billet.

Le nouveau communiqué de presse diffusé le 4 juillet nous apprend :

  • qu’il s’agit non pas d’un rachat mais de la constitution d’un nouveau groupe,
  • que ce dernier rassemble non seulement Cadremploi et Keljob, mais également – surprise ! – Explorimmo, le site de petites annonces immobilières du Figaro,
  • et, enfin, que l’entité ainsi créée entend se positionner en tant un généraliste des petites annonces (emploi, formation, immobilier… pour commencer).

Voici, avec un peu de retard, quelques informations supplémentaires relevées dans la presse et de premières hypothèses sommaires sur les synergies envisageables entre les différents modèles de services ainsi regroupés.

C’est sur FocusRH, qui consacre plusieurs articles à l’événement, et dans Le Figaro, qui est naturellement plutôt bien renseigné, que l’on trouve les informations les plus complètes. Je ne reviens pas sur la gouvernance du nouvel ensemble mais sur les éléments relatifs à sa stratégie.

Dans l’article du Figaro, on a confirmation de l’appel du pied aux autres grands acteurs français, et en particulier à ceux liés aux titres de presse (suivez mon regard…). La référence a CareerBuilder, qui, aux Etats-Unis, permet à la presse de résister efficacement au pure player Monster, est intéressante :

« «Ce projet a vocation à être ouvert à d’autres groupes médias», précise Pierre Conte, le président de Publiprint, Cadremploi et Explorimmo. C’est une « maison ouverte » à l’image du modèle développé par CareerBuilder aux Etats-Unis qui fédère plus de 130 titres de presse. En attendant cette échéance, la nouvelle entité entend procéder à des alliances, des rachats ou des créations d’entreprises sur le marché européen en capitalisant sur sa stratégie multimarque. »

En cohérence avec le positionnement « classifields » mis en avant dans le communiqué de presse, l’article précise également que « la nouvelle entité ne s’interdit pas de faire son entrée sur d’autres secteurs que ceux de l’immobilier, de l’emploi et de la formation. »

Par contre, rien n’est dit sur la manière dont vont être associés les deux modèles évoqués dans le communiqué de presse : « site média » (cadremploi, cmonjob, explorimmo…) et « métamoteur » (keljob, kelformation). D’une manière générale, la pluralité des modèles regroupés dans ce nouvel ensemble est rarement soulignée dans la presse et on ne trouve aucune analyse ou hypothèse sur leur articulation.

FocusRH est le seul à s’aventurer un peu sur ce terrain. Dans cet article, on peut lire que « les offres de Cadremploi et de Cmonjob devraient être référencées sur Keljob, de même le modèle de métamoteur pourrait fort bien se décliner sur le marché de l’immobilier ».

C’est pourtant à mon sens la question centrale qui se dégage de cette fusion, comme je l’avais laisser entendre dans mon précédent billet. Et le fait que la nouvelle entité se positionne comme un généraliste des petites annonces renforce encore cette problématique.

Personnellement, je ferais volontiers l’hypothèse d’une différenciation accrue des services. Si les petites annonces des sites média du groupe sont amenées à être référencées sur le métamoteur (je préfère parler d’agrégateur), il est vraisemblable qu’elles seront mises en avant par rapport aux annonces externes. Ces dernières se trouvant rejetées en fin de listing, le prix facturé pour leur référencement pourrait alors baisser, ce qui permettrait au passage d’accroître sensiblement le nombre d’annonces référencées.

Dès lors, il y aurait pour le client le choix entre, d’une part, un référencement direct à faible coût mais noyé dans la masse et, d’autre part, une publication coûteuse sur les sites média assortie de l’assurance d’apparaître en bonne place sur l’agrégateur. L’affichage sur ce dernier d’un nombre d’annonces très élévé est susceptible d’attirer une forte audience du fait du sentiment pour les candidats de bénéficier d’une information centralisée. On peut penser que, dans ces conditions, les premières places dans les résultats se vendront très cher.

Dans ce modèle, on peut tout à fait envisager une extension du champ du référencement gratuit (qui existe déjà chez Keljob mais se limite à quelques cas précis) de manière à accroître le volume d’annonces et ainsi apparaître comme un infomédiaire incontournable. Comme je l’ai déjà évoqué, ceci présenterait l’avantage de couper l’herbe sous le pied des agrégateurs et autres sites gratuits d’annonces classées type craiglist, qui sont pour le moment peu développés en France, mais « attendus » (selon les termes de Pierre Conte).

Précisons pour terminer qu’il n’y a rien de très original dans ces quelques hypothèses, puisqu’elle se situent dans la lignée de ce qui est observé depuis plusieurs mois aux Etats-Unis. D’ailleurs, à la lumière de l’expérience américaine, j’ajouterai qu’il est également imagineable qu’apparaissent sur les sites médias du nouveau groupe, après leurs annonces propres, des résultats « en provenance du web » générées par les agrégateurs. Ce ne serait qu’une autre manière de mettre en musique la même stratégie.

7 commentaires »

  1. Claude said

    Merci pour cette analyse. Votre hypothèse sur la différenciation accrue des services est intéressante et tout à fait vraisemblable. Wait and see…
    En tout cas, ce marché est décidemment passionnant à observer !

  2. Typhaine said

    Merci d’apporter des précisions peu fréquentes sur ce secteur.
    Pourrais-je cependant avoir une explication plus précise de la dictinction entre site média et métamoteur? Merci beaucoup…

  3. Typhaine > Ces termes sont en fait ceux du communiqué de presse, pas les miens. Mais je vais quand même essayer de préciser un peu ce qu’ils recouvrent, d’autant qu’ils ne sont pas exempts d’une certaine ambiguité.

    Le terme de « métamoteur » renvoie au concept d’un service permettant d’interroger plusieurs moteurs de recherche via une seule et même interface, les résultats étant ensuite triés selon leur « pertinence ». Dans le domaine de la recherche générale sur Internet, un des métamoteurs les plus anciens et les plus connus est Copernic.

    Keljob a repris ce terme pour l’appliquer au champ de la recherche d’emploi en ligne. La démarche marketing était de présenter ce site comme un service permettant d’interroger plusieurs sites emploi à la fois (notamment : anpe.fr, apec.fr, cadremploi, cadresonline…). Le fonctionnement réel était toutefois un peu différent, l’interrogation ne se faisant pas en temps réel mais sur une base d’offres référencées par l’intermédiaire de robots parcourant a priori les différents sites.

    Plusieurs des sites en question n’ont pas particulièrement apprécié l’opération, en particulier Cadremploi, qui a porté l’affaire en justice (on mesure le chemin parcouru pour aboutir à la fusion dont il est question dans cette note). Face à cette situation, Keljob a choisi de se tourner vers des services payants de référencement des offres paraissant sur les sites carrières des entreprises et sur ceux des professionnels du travail temporaire et du placement. L’appelation de métamoteur ne correspond donc plus que très partiellement au fonctionnement du site et revêt essentiellement une dimension marketing.

    Quant au terme de « site média », c’est beaucoup plus simple : il renvoie ici aux services classiques de publication d’annonces en ligne. En matière d’emploi, on parle de « job board » (déf.). Ceci dit, l’appelation « site média » peut aussi renvoyer à des réalités beaucoup larges dans d’autres contextes, et son emploi dans le communiqué de presse ne m’apparaît pas complètement univoque.

    Voilà, j’espère que mes expliquations alambiquées vous seront utiles 😉

  4. Typhaine said

    Ces expliquations sont très claires.
    Merci beaucoup pour votre disponibilité et la rapidité de votre réponse!

  5. Adenclassifieds rachèterait Cadresonline

    Le processus de concentration sur le segment des job boards généralistes continue en France : d’après le Figaro (qui est logiquement bien informé en la matière), Adenclassifieds rachèterait Cadresonline.
    C’est une suite très logique …

  6. Zuliani Delphine said

    Bonjour,
    Pour mar part, je me pose des questions sur la/les CVthèque(s).
    AdenClassified va-il permettre aux recruteurs d’avoir acces à toutes les CVthèques de façon centralisées.? C’est à dire, pourrons nous avoir acces aux CV des personnes inscrites sur cadreomploi, keljob, cadreonline?
    Merci d’avance

  7. Delphine > C’était en cours avant le rachat de Cadresonline. Je suppose que c’est toujours d’actualité, mais il est possible que ce dernier évènement retarde un peu les choses.

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